Dynamisme et tradition

 

La mort, en mars dernier, d'Eugčne Guillevic, un des plus grands počtes de la Bretagne, vient nous rappeler que ce "pays" est une vieille terre de culture, au riche passé et à l'identité fortement marquée. Mais, simultanément, les indicateurs économiques les plus récents font apparaître le dynamisme et la réussite d'une région qui se situe, en de nombreux domaines, dans le peloton de tęte des régions françaises.

 

"La Bretagne - qui ne le sait ? -, rappelle l'écrivain Charles Le Quintrec, ce sont des roches, des landes, des champs, des bois, des taillis, des écarts, des ha­meaux, des villages, des ports, des plages, des grčves, le tout nimbé par la mer et par l'Océan. (1)" Il aurait pu également évoquer "la mouette et l'ajonc" de la chanson La blanche her­mine, les menhirs et les dolmens, les cha­pelles et les calvaires, mais aussi la foręt de Brocéliande oů rôdent les ombres du roi Artus et du chevalier Lancelot, de l'enchanteur Merlin et de la fée Viviane. Mais en męme temps que cette Bretagne géographique et légendaire, il existe une Bretagne économiquement trčs dyna­mique, par son agriculture, son industrie agro-alimentaire et, de plus en plus, son tissu de PME et de PMI (2). Le patron d'une de ces entreprises affirme que "la Bretagne pèse plus que la Gréce", pré­cisant que, depuis les années 1950, elle a multiplié par deux les emplois indus­triels et accru des trois quarts les effectifs du secteur tertiaire. De fait, dans cette "terremer", comme la définit l'écrivain Michel Le Bris, l'industrie agro-alimentai­re, forte de ses cinq cents établisse­ments, est le principal employeur et représente 33% des exportations de la région.

Ainsi, la société Coopagri de Landerneau emploie environ quatre mille personnes, annonce trente-sept mille exploitants-ad­hérents, possčde quinze unités de fabri­cation et quarante-huit filiales et réalise un chiffre d'affaires de près de neuf mil­liards de francs. Premičre en Europe sur le marché de la viande, Coopagri est également en trčs bonne position pour la volaille, le lait, les biscuits, les pâtes et autres produits alimentaires frais ou congelés qu'elle exporte également en Extręme-Orient. Son PDG commente: "On va de la fourche à la fourchette ! Et on change les comportements paysans à qui l'on demande de produire de la qua­lité pour des marchés solvables." À Châteaulin, l'entreprise Doux est le premier exportateur de poulets en Europe, tout en étant présente sur les marchés du Moyen-Orient. Elle fait tra­vailler six mille sept cents personnes et deux mille six cents aviculteurs représen­tant plusieurs pays de l'Union européen­ne, pour un chiffre d'affaires de près de huit milliards.

LE FRANÇAIS DANS LE MONDE N° 289